La route la plus directe pour traverser la Suisse du Nord au Sud, de Saint-Gall à Chiasso, passe par Coire, le col du San Bernardino et Bellinzone. Compter environ 300 km. Comme nous avions du temps devant nous, nous avons choisi de faire un détour par l’Autriche et l’Italie.
Jour 1 : Rheintal
Départ de Saint-Gall le samedi 1er juillet 2023 avec mes fidèles et joyeuses coéquipières Sabina et Mary. Direction le lac de Constance puis la vallée du Rhin jusqu’à Oberriet, où nous traversons le fleuve pour entrer dans le Vorarlberg autrichien. Première nuit à Bludenz après une journée de mise en jambe tranquille.
Jour 2 : Silvretta
Les choses sérieuses commencent: nous suivons la Silvretta Hochalpenstrasse jusqu’au Bielerhöhe (2’032 m). Le col se situe sur une route privée à péage (gratuite pour les vélos), ce qui a l’avantage de limiter la circulation. L’ascension des 32 virages se fait dans le brouillard et par une température assez fraîche. Quelques éclaircies vers le sommet, mais malheureusement insuffisantes pour apercevoir le fameux Piz Buin.
Sur l’autre versant du col, c’est le Tyrol autrichien. Longue descente jusqu’à Landeck où nous rejoignons l’Inn qui coule depuis la vallée grisonne de l’Engadine (CH).
Jour 3 : Inntal
Cap à l’est en suivant la vallée de l’Inn jusqu’à Innsbruck. Pour pimenter la journée, nous décidons de nous écarter du cours d’eau à la hauteur d’Imst. Nous nous égarons un peu et les chemins sont de moins en moins praticables. Il faut porter les vélos. L’étape qui s’annonçait comme une longue descente de l’Inn aura été plus relevée que prévu.
Jour 4 : Südtirol
Direction le sud via le col du Brenner (1’370 m). La montée suit une route cyclable balisée qui nous fait passer à bonne distance de l’imposante « autoroute à camion » qui serpente dans la vallée. Au sommet du col, c’est l’Italie, dans une ambiance particulière: centre commercial, magasins outlet, restaurants. La descente est par contre magnifique, suivant le tracé d’une voie de chemin de fer désaffectée récemment reconvertie en route cyclable.
Nous sommes à présent dans la province de l’Alto Adige, ou Südtirol en allemand. Cette région d’Italie est en effet à majorité germanophone. Jusqu’à la fin de la première guerre mondiale, elle faisait partie de l’empire austro-hongrois. C’est en 1919 qu’elle est rattachée à l’Italie. Le régime fasciste essaya de l’italianiser, sans grand succès, en favorisant notamment une importante immigration italophone. A la fin de la deuxième guerre mondiale, la province reste italienne, en obtenant une autonomie accrue, qui fut rapidement étendue à la province voisine du Trentino. Toute cette région bénéficie encore aujourd’hui d’une très large autonomie législative, administrative et financière, au même titre que la Sicile, la Sardaigne, le Frioul et la Vallée d’Aoste.
Nous passons notre première nuit italienne à Brixen/Bressanone.
Jour 5 : Trento
Nous partons pour Trento et l’italien reprend petit à petit ses droits. Le matin, la route jusqu’à Bozen/Bolzano est belle et agréable. L’après-midi, après une pause un peu trop longue sur une terrasse, la route est beaucoup moins intéressante, et le vent souffle très fort, de face évidemment. Une longue étape toute plate mais usante.
Jour 6 : lago di Garda
Réveil sous la pluie à Trento. Nous mettons le cap à l’ouest. Arrivés à l’extrémité nord du lago di Garda, nous nous apprêtons à suivre une piste cyclable qui longe le lac « suspendue au-dessus de l’eau ». Une merveille d’après ce que nous avons pu lire sur divers sites. Mais la piste est fermée après quelques centaines de mètres. Il faut donc improviser en grimpant de petites routes dans les falaises avoisinantes. Une ascension difficile mais magnifique qui nous mène au lago di Ledro.
Puis une longue et belle descente jusqu’à Storo, où nous dormons à l’hôtel Barambana. Un témoin d’une époque glorieuse, qui nous est racontée par la tenancière octogénaire: à son apogée, dans les années 80, l’établissement était un lieu incontournable de la vie nocturne locale. Nos vélos ont ainsi le privilège de dormir dans l’ancienne discothèque, à laquelle on accédait par un improbable tunnel en arc de cercle.
Jour 7 : Bergamo
L’été est de retour, il fait très chaud. Et le relief est bien plus exigeant que ce que laissait présager la carte. Nous passons par les lacs d’Idro et d’Iseo. A Iseo, après avoir réparé une crevaison, nous filons jusqu’à Chiuduno dans la banlieue de Bergamo. Un peu moins de 10 km à toute vitesse dans le trafic dense de la fin de journée, pour attraper un train qui nous mènera au centre ville. C’est sportif mais nous y arrivons à temps, avec même quelques minutes d’avance.
Jour 8 : Ticino
Nous reprenons le train pour sortir de Bergamo et nous rendre à Lecco, au sud-est du lago di Como. L’objectif est de suivre la rive du lac vers le nord jusqu’au très touristique village de Bellagio, puis revenir vers le sud jusqu’à Como. L’étape débute par deux tunnels sur une route assez fréquentée. La signalisation locale ne nous permet pas de comprendre si les tunnels sont ou non autorisés aux vélos. Nous sommes perplexes mais décidons finalement de nous lancer (voyant que d’autres cyclistes le font). Arrivés à Como, nous entrons en Suisse par la douane de Chiasso. Il fait très chaud et nous buvons une bière sur la terrasse du Moka Efti, stamm de jeunesse de mes compagnes de voyage.
Nous roulons enfin jusqu’à Meride, où nous sommes accueillis avec les honneurs chez les parents de Sabina (après avoir fait une petite halte chez son frère à Arzo pour boire un bianchino). Deuxième apéro, puis repas avec la famille de Sabina au grand complet. Mais sans Mary qui est partie voir sa maman à Lugano.
Le dimanche je me lève tôt, je croise un scorpion dans le salle de bain et je vais prendre le train à Mendrisio pour revenir à Genève via le tunnel du Saint-Gothard et Zurich.
Au compteur
Un magnifique périple: 742 km et 7520 m de dénivelé, du froid et des températures caniculaires, de la pluie, du vent et du soleil, beaucoup de rires et quelques larmes, deux crevaisons et une chute stupide.
La très bonne surprise du voyage: le réseau cyclable parfaitement balisé et entretenu en Autriche, dans la Haute Adige et le Trentin (ensuite ça ce gâte).
©Photos: G. Pralong